Starr a seize ans, elle est noire et vit dans un quartier difficile, rythmé par les guerres entre gangs, la drogue et les descentes de police. 
Tous les jours, elle rejoint son lycée blanc situé dans une banlieue chic ; tous les jours, elle fait le grand écart entre ses deux vies, ses deux mondes. 
Mais tout vole en éclats le soir où son ami d’enfance Khalil est tué. Sous ses yeux, de trois balles dans le dos. Par un policier trop nerveux. Starr est la seule témoin. Et tandis que son quartier s’embrase, tandis que la police cherche à enterrer l’affaire, tandis que les gangs font pression sur elle pour qu’elle se taise, Starr va apprendre à surmonter son deuil et sa colère ; et à redresser la tête.

Voilà un livre que j’avais repéré depuis un petit moment et que je voyais souvent revenir sur les réseaux sociaux mais sans jamais oser sauter le pas. Il faut dire que rien qu’en lisant le résumé, on se doute qu’il ne va pas s’agir d’une lecture extrêmement joyeuse et j’attendais donc de trouver le bon moment pour lire ce livre.

« J’ai toujours dit que si ça arrivait à quelqu’un sous mes yeux, j’ouvrirais ma gueule en grand, je mettrais le monde entier au courant. Et ben voilà, j’y suis. Mais j’ai trop peur pour parler. »

Dans ce livre, nous faisons la connaissance de Starr, une jeune fille très intelligente et dont la force de caractère va ressortir tout au long du livre. A 10 ans, elle a été confrontée à la mort de sa meilleure amie Natasha, tuée par une balle perdue puis, plusieurs années plus tard, la voilà témoin du meurtre de son autre meilleur amie Khalil, tué par un policier. Traumatisée par ce qu’elle a vécu, elle se bat continuellement entre sa peur et son besoin de parler.

« L’année de mes douze ans, mes parents ont eu deux conversations avec moi. La première, c’était sur les choux et les roses. (…) La deuxième conversation c’était pour m’expliquer quoi faire si un flic me contrôlait. »

Une chose qui m’a énormément touché dans ce livre est la scène où Starr et Khalid se font contrôler par le policier. On se rend compte que Starr a appris dès le plus jeune âge certains codes : retenir le matricule du policier, ne pas faire de gestes brusques, ne pas répondre, mettre ses mains en évidence et même comment compresser une plaie en cas de blessures par balle. En regardant Grey’s Anatomy, j’avais déjà vue une scène similaire ou Bailey explique à son fils ses fameux gestes à faire en cas de contact avec la police et c’est une chose qui me touche et qui m’énerve profondément. Je trouve grave que des enfants innocents soient obligés d’apprendre des gestes pour survivre.

« On avait dix ans, on ne savait pas ce qui se passait après la mort. Je ne sais toujours pas en vrai, mais elle, si. Elle n’a pas eu le choix, même si elle n’en avait pas envie. »

Ce livre met également en avant le barrage culturel important qui existe entre les blancs et les noirs. Il y a énormément de préjugés d’un côté comme de l’autre et on voit que Starr n’arrive pas à jongler entre sa vie en quartier sensible et sa vie dans un lycée blanc d’une banlieue chic. Elle passe son temps à surveiller sa manière de se comporter pour correspondre aux normes de chaque milieu et pourtant malgré ça, elle ne parvient pas à s’adapter et est considérée comme un outsider des deux côtés, trop noire pour être blanche et se comportant trop comme une blanche pour être noire.

« Il faut que je fasse attention à ce que je dis et à la manière dont je le dis, mais je ne peux pas non plus parler comme une Blanche. »

Sont également abordées les émeutes, les mouvements de foules et la violence qui se crée en réaction de cette violence policière. On se rend compte que la situation est tendue des deux côtés mais que la violence ne fait rien progresser. On voit également via le personnage totalement détestable de Hayley que le racisme a subi une énorme banalisation au point que des insultes sont considérées comme normales et drôles. Vient également l’importance des réseaux sociaux, que l’on a d’ailleurs vu exploser avec le mouvement #BlackLivesMatter ainsi que leur fonction libératrice. Quand Starr est sous le choc et n’arrive pas à parler, elle se réfugie dans les réseaux sociaux qui devient alors le seul moyen pour se faire entendre.

« C’est ça le soucis. On laisse les gens dire des trucs, et ils en abusent au point qu’ils ne voient plus le problème. Et que ça devienne normal pour nous. »

Angie Thomas intègre également de manière très importante les gangs qui sèment la terreur dans les villes. Elle propose une réflexion que j’ai trouvé énormément intéressante sur la raison qui poussent des individus à rejoindre des gangs. Finalement, elle nous montre que tous ne rentrent pas par plaisir, beaucoup y sont contraints car ils ne connaissent que ça ou tout simplement car, même s’ils rêvent d’un meilleur avenir, on ne leur laisse pas leur chance et c’est leur seul moyen de survivre. Avec les personnages de DeVante et de Maverick, on voit qu’il est très difficile, voire impossible de sortir définitivement de ce milieu.

« Un jour, papa m’a raconté que tous les hommes noirs portaient en eux la colère de leurs ancêtres. Une colère datant du jour où ils n’avait pas pu empêcher les esclavagiste de s’en prendre en leur famille. »

Un autre point que j’ai été ravie de voir soulever dans ce livre concerne les médias. L’autrice pointe d’abord du doigt leur acharnement à traquer et exploiter le malheur des autres, quitte à parfois modifier la vérité. Ici, les médias vont jouer sur la crainte et la notion d’insécurité pour justifier l’acte du policier et décrédibiliser la mort de Khalil, insistant sur le fait qu’il appartenait à un gang. On assiste donc à un renversement total des rôles avec un policier qui passe du rôle de coupable à celui de victime.

« – Tu te souviens de ce que je t’ai dit sur ta voix ?
– Que c’était ma plus belle arme. »

C’est un livre fort et poignant à lire qui je pense devrait être lu par tout le monde. Ce n’est pas une partie de plaisir puisque même si c’est une fiction, il est impossible de dissocier le caractère réel des faits. Les violences policières font partie du quotidien, que ce soit aux Etats-Unis où elles sont les plus nombreuses mais également en France. Certains moments m’ont touché alors que d’autres m’ont profondément énervé au point que j’ai parfois dû arrêter ma lecture. Le livre ne connaît pas de Happy Ending, il suit la ligne directrice du livre ainsi que la réalité. Ce n’est pas une belle fin, c’est une fin dure mais réelle.

«  Les gens réalisent, crient, manifestent, exigent. Ils n’oublient pas. Je crois que c’est ça le plus important. »

Finalement, c’est un livre dur mais très complet. Beaucoup de moments historiques sont abordés comme la mort de Malcolm X, le mouvement Black Panthers et la révolte des esclaves de 1831. J’ai terminé ma lecture avec énormément de colère et de tristesse mais ce livre offre une profonde réflexion : Qu’est-ce qu’on pourrait faire pour changer les choses ?

Auteur : Angie Thomas
Titre : The Hate U Give (La haine qu’on donne)
Edition : Nathan
Nombre de pages : 488 pages
Prix : 17,95€

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